L’effet ciseaux dans les budgets des départements : Comment proposer un budget sincère pour 2024 ?

Le président de l’association Départements de France, François Sauvadet, avait prévenu il y a un an : en 2023, cela devrait passer, mais à partir de 2024, c’est incertain. « L’année 2023 nous fait craindre le retour de l’effet de ciseau avec une chute des recettes et une évolution des dépenses ». Ainsi, l’ensemble des départements français sont touchés à plus ou moins grande échelle par des recettes de fonctionnement en baisse et des dépenses contraintes en forte hausse. Et sans autonomie financière suffisante, certains territoires vont décaler le vote du budget 2024 pour se donner le temps de trouver des solutions et les petites communes seront probablement en première ligne à travers la dotation de solidarité rurale et la dotation d’aménagement rural qui tend à fortement se réduire.

Dans les Ardennes, l’État impose près de 14 millions d’euros supplémentaires de dépenses au budget 2024 du département. En Loire-Atlantique, il manque 100 millions pour boucler le budget. Pour l’Hérault, les recettes liées aux droits de mutation à titre onéreux (DMTO) devraient être en baisse de 50 millions et avec la perte des recettes de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB), remplacée par une portion de TVA, c’est encore quelques millions qui disparaissent des budgets sans compensation de l’État. L’inflation ainsi que la revalorisation de 4,6 % du RSA (revenu de solidarité active) décidée à partir du 1er janvier 2024, viendront elles aussi encore plomber les comptes.

Pour le moment, seuls la Loire-Atlantique et la Charente-Maritime ont annoncé le report du vote du budget 2024. Pour Michel Ménard, président (PS) du département de Loire-Atlantique, et Ali Rebouh (PS) en charge des finances, impossible de présenter un budget équilibré et sincère car, contrairement à l’État, les collectivités ont l’interdiction de faire de la dette pour le fonctionnement, même si la capacité de désendettement reste très faible (sous les trois ans).

Du côté des recettes, pas de miracle possible : de réforme en réforme, l’autonomie financière des collectivités et plus particulièrement des départements a été réduite à peau de chagrin. Les régions en sont rendues à augmenter la taxe sur les certificats d’immatriculation : 31 % en Normandie, 19 % en Île-de-France ou encore 10,4 % en Centre-Val-de-Loire. Mais ici, impossible de trouver des dizaines de millions d’euros en nouvelles recettes. Le risque est fort de voir un nombre important de départements sabrer dans les dépenses les moins contraintes (aide aux communes, services publics décentralisés, service d’urgence, entretien des collèges et des routes…)

La perte d’autonomie va plus loin qu’un simple débat budgétaire : elle pose la question de la démocratie locale et de l’accès aux services publics pour les habitants éloignés des centres urbains. Le triptyque Métropole, Région, État s’impose non par les urnes, mais par les projets de loi de finances qui, pour rappel, sont passés à coup de 49,3.